Comment diminuer l’emprise du corps de souffrance?

Par Eckhart Tolle

–     Q. – Bonjour Eckhart

–     E. – Bonjour

–     Merci beaucoup de prendre ma question ! Elle concerne surtout le corps de souffrance. Quand il s’active, comment puis-je réduire son emprise sur moi ? Il semble que je puisse en être consciente quand il est actif, peut-être pas continuellement, mais au moins par intermittence, et je peux l’observer en train d’agir. Or, malgré cette conscience, je continue de me sentir agitée et contrôlée par lui, à sa merci quoi qu’il en soit pendant plusieurs heures, souvent en pleine nuit, quand ma conscience ferait mieux de dormir. Je pense souvent à votre observation concernant des canards qui se battent et qui battent simplement des ailes à la fin du combat et libèrent toutes les énergies négatives, pouvant alors continuer de nager tranquillement. Donc, ma question : métaphoriquement, comment puis-je battre des ailes ?

–     E. – Qu’est-ce qui vous réactive habituellement ?

–     Q. – Je ne sais pas s’il y a une chose habituelle. Il peut s’agir de quelque chose d’anodin qui se passe au travail et en pleine nuit, Je pense que j’aurais dû agir autrement, à ce que j’aurais dû dire, ça tourne en rond dans ma tête.

–     E. – Donc, ce qui vous réactive, ce sont certaines pensées dans la tête ?

–     Q. – Oui, absolument, j’en suis consciente parfois et je peux voir que ce ne sont que des pensées, mais je me demande pourquoi je ne peux pas les arrêter. Je n’y arrive pas.

–     E. – Donc, parfois, la réaction émotionnelle du corps de souffrance arrive quand vous pensez à quelque chose qui s’est produit le jour précédent et non pas forcément au moment même où cela s’est produit. Cela commence quand vous vous mettez à y penser.

–     Q. C’est exact.

–     E. – C’est important d’observer le lien entre les processus mentaux et les émotions et c’est important de couper ce lien entre les émotions et les pensées. Autrement, les pensées sont ce qui donne vie aux émotions et les nourrit. En fait le corps de souffrance se nourrit de certains types de penser, parce que la pensée est de l’énergie. Et si vous n’êtes pas suffisamment observatrice, vous ne vous rendez pas compte qu’en alimentant le corps de souffrance avec vos pensées, vous l’amplifier et vous le perpétuez.

Cela n’arrive pas au canard, parce que le canard n’est pas encore arrivé au niveau du penser. Il y a là de la conscience, bien sûr, mais le canard ne pense pas en lui-même à ce que cet autre canard lui a fait il y a quelques heures : « C’était terrible ! Qu’est-ce que je vais faire si ça se reproduit ? ». On revit la situation dans sa tête et l’émotion est encore pire. Vous êtes vraiment sous l’emprise du corps de souffrance quand le corps de souffrance est totalement relié aux processus mentaux et quand vous pensez à travers le corps de souffrance.

Toutes vos pensées sont alors déterminées par l’émotion qui pourrait être la peur, qui pourrait être la colère. Vos pensées sont alors complètement contaminées par la vieille émotion en vous. Peu importe à quoi vous pensez, peu importe la situation à laquelle vous pensez, peu importe la personne à laquelle vous pensez, que ce soit à vous-même ou à quelqu’un d’autre, ce sera une déformation totale de la réalité, parce que vos pensées seront contrôlées par le corps de souffrance. Vous regardez le monde, vous-même et les autres à travers les émotions.

Vous pouvez vous écouter vous-même ou, ce qui est plus facile, écouter quelqu’un d’autre qui est sous l’emprise du corps de souffrance et qui parle de la façon dont il perçoit le monde à ce moment particulier. Vous pouvez voir alors combien il est victime de ses illusions, mais il ne le sait évidemment pas. Il pense que c’est la seule façon de voir la chose : « La façon dont je juge cette personne ou cette situation est incontestable et il n’y a rien d’autre à dire. Elle est comme ça ! Il m’a trahi, il m’a trompé, il m’a fait ça »…

Il n’y a alors pas de séparation entre l’émotion et la pensée. Voyez donc comment cela arrive, si vous pouvez le saisir le plutôt possible. La pensée arrive et vous sentez l’émotion correspondante et vous pouvez vous dire alors : « Ah, je viens de le faire ! Je viens juste de m’approcher du corps de souffrance. » Il y a alors une conscience là. À ce moment-là, l’émotion est peut-être déjà là et va subsister pendant un moment, mais si vous ne continuez pas d’y penser et continuez au contraire d’être la conscience, elle va s’éloigner très rapidement. Dans ce cas, vous n’êtes pas sous son emprise.

Peut-être ne pouvez-vous pas vous débarrasser tout de suite de l’émotion et ce n’est pas nécessaire. En fait, lui permettre d’être là telle qu’elle est, c’est vraiment quelque chose de très puissant, au lieu de vous dire que vous ne devriez pas l’éprouver, parce que dans la conscience spacieuse, elle peut réellement se dissiper, quand vous la permettez, quand vous n’y résistez pas. Or, il vous faut faire attention qu’elle ne se rattache pas à votre mental pour se nourrir alors de vos pensées. Vous retrouveriez là le cercle vicieux : l’émotion génère des pensées, les pensées amplifient l’émotion, l’émotion génère plus de pensées, etc. Cela demande donc de la vigilance.

Si c’est plus particulièrement la nuit que vous vivez ça, quand vous vous réveillez et que le processus se met en route, il vous faut être vigilante à ce moment-là. Quand vous vous réveillez en pleine nuit, je recommande aussi d’aller directement dans le ressenti du corps subtil de sorte que votre attention passe du mental au champ d’énergie du corps subtil. Ressentez l’état vivant du corps subtil alors que vous êtes allongée dans votre lit la nuit. En fait, c’est commencer à être présent. Vous êtes là présente de tout votre être et vous sentez cette présence en vous. Le besoin de penser diminue alors. Si vous ne pouvez pas le faire, restez attentive pour saisir la première pensée et voyez comment elle produit l’émotion.

Il est aussi possible que l’émotion a traîné par-là, n’ayant pas pu sortir pendant la journée, et elle s’apprête maintenant à se nourrir de vos pensées. Elle attend par-là et elle profite de ce moment où vous êtes peut-être encore un peu endormie pour se faufiler dans votre mental. La vigilance est nécessaire. Ce n’est pas que vous ayez à vous débarrasser de l’émotion. C’est le lien entre l’émotion et vos processus mentaux. Saisissez ça, mais vous ne pouvez le saisir qu’en étant consciente, en étant vigilante. Plus l’émotion est forte et plus vous devez être vigilante. Vous avez donc besoin de ce que j’appelle parfois l’épée de la présence de sorte que vous coupiez le lien entre l’émotion et le penser . . . Vous maniez l’épée . . . et vous êtes le guerrier . . .

Ça va bien pour le canard, il ne pense pas. C’est facile pour lui d’aller comme ça . . . Vous avez peut-être observé des canards qui se retirent après une bagarre. Ils battent des ailes et il n’y a plus trace d’aucune émotion, si l’on peut parler d’émotions, il ne reste plus rien de l’énergie de la bagarre qui était là, l’agitation qui était là . . . Et ils sont là, ils battent des ailes et . . . Plus rien, tout est parti. Or, les humains ne peuvent pas faire ça, peut-être le maître zen, mais le maître zen reste dès le départ sans émotions…

–     Q. – Merci.

(Traduction Robert Geoffroy : http://blogbug.filialise.com)

 

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Date de dernière mise à jour : 08/05/2019

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